Aller à la maternité à pied
A la demande de Thygo,
petit récit d'un voyage hors du temps ...
Premier dimanche de janvier 2016,
il est 1h du matin passé,
nous ne nous sommes pas couchés...
Pas faute d'avoir essayé,
en rapatriant draps et couette
sur le convertible du salon,
mais les contractions m'empêchent de dormir,
et du coup, à arpenter le salon,
j'empêche de dormir Nostradamus.
Il a pour rôle de noter les contractions
A chaque nouvel élancement,
je dit un "ça commence", et il appui sur mon smartphone,
puis attend le "c'est bon", pour valider...
en me demandant l'intensité
facile a mesurer, tient !
Donc, au petit matin,
après un peu plus de 2h de ce petit jeu,
et avoir découvert tous les recoins du salon
et passer un temps incalculable au WC,
nous décidons de nous mettre en route.
La "valise" est prête, sac de voyage sur roulette
le sac pour l'accouchement étant un sac à dos...
il faut savoir s"équiper en cohérence
avec son mode de transport !
Je chausse mes chaussures de randonnées,
que je lace seule comme une grande,
revêt mon manteau, mon bonnet et mes gants
Nostradamus se couvre également,
et s'occupe des bagages...
Nous avons décidé, en pleine conscience,
de nous rendre à la maternité à pied.
je suis détendue, zen...
Je sais que j'en ai la force,
et j'ai envie de me (nous) faire confiance
Après tout, voilà déjà 2h que je tourne en rond à la maison.
et puis j'ai envie de vivre cette expérience aussi
avec mon chéi, avec mon bébé !
En fait, j'ai du mal à concevoir que je vais accoucher.
depuis le début de cette grossesse,
l'acouchement me semble loin, loin, loin...
j'ai du mal à l'ancrer dans la réalité !
Dehors, le ciel est clair,
nous voyons la lune et les étoiles.
il fait frais, mais beau,
la pluie n'arrivera que plus tard dans la nuit.
Pas de pleine lune,
j'ai "loupé" le créneau de Noël !
Avant de partir,
nous vérifions que toutes les portes sont verrouillées,
et puis le convoi se met en route !
Je suis en tenu de grossesse,
tunique et leggings,
avec des chaussures de rando au pied.
Pas très glamour, ni très fashion, mais confortable.
Nous avons quand même la ville à traverser
petite balade de 3,5 km !
Nous descendons la rue,
la ville est somnolente,
mais pas complètement endormie.
Une voiture nous dépasse,
ce n'est pas la tête connue d'un voisin,
mais j'ai l'impression qu'il nous regarde étrangement...
il faut dire que voir un couple trimballer une valise
à cette heure là, dans une petite ville de province
est un peu ... peu ordinaire !
Nous descendons jusqu'au bord de la rivière,
où une première halte avait été planifiée :
il y a des WC publics !
Pas de bol, pour éviter les dégradations,
ils sont verrouillés pour la nuit.
Tant pis, l'envie est trop forte,
je contourne le local,
et profite de l'espace vert qui l'entoure.
tant pis pour la dignité,
de toute façon, il n'y a personne pour me voir
et ce n'est ni la première, ni la dernière fois
que je me soulage sur un bas côté !
(bon, peut-être une première en ville !)
Nous reprenons notre chemin,
direction le centre ville.
Nous hésitons à traverser la rivière,
et prendre un itinéraire piéton
sur quelques centaines de mètres
ou rester encore sur la même rive, moins agréable,
mais à côté de la chaussée.
Nous optons pour la proximité de la chaussée,
plus facile d'accès au besoin,
et plus roulante pour la valise.
Un peu plus loin, sur le pont,
nous entendons des éclats de voix
et apercevons des silhouettes
qui paraissent bien imbibées
elles sont sur notre chemin,
j'hésite à bifurquer,
mais elles s'éloignent avant notre approche.
Nous voilà au coeur de la ville.
il y a plus d'animation dans la rue.
Quelques voitures passent
une bandes de jeunes, bien réchauffées,
assises à l'arrêt de bus...
qui ne passera que dans une 10aine d'heures !
Direction les WC, en espérant qu'ils soient ouverts
car là, moins facile
de se soulager discrètement à proximité.
la porte s'ouvre, je suis sauvée!
A ce stade, la moitié du parcours est faite !
Je me sens toujours en forme.
marcher m'aide à gérer les contractions,
la fraicheur de la nuit est agréable,
le parcours est agréable.
De toute façon , jesuis hors du temps...
Nous avançons bien,
même si je ralentis le rythme à chaque contraction
la nuit est agréable,
marcher et avoir un objectif
m'aident à gérer l'épreuve...
Puis nous entamons la 2nd moitié du parcours.
Démarrage difficile, la rue est raide !
Je monte doucement, haletante,
devant faire des micro pauses tous les 5-6 pas.
Arrivée en haut, nous constatons que la place
se transforme en un parking géant la nuit...
Et nous nous interrogeons sur le nombre de fous personnes
qui auraient optés, dans notre cas,
pour ce périple nocturne,
probablement le dernier rien qu'en amoureux,
avant quelques temps...
Tout en haut, nouvelle halte au WC,
eux aussi ouverts, même si peu engageants...
quelques âmes peuplent la nuit,
mais la ville est calme, reposante..
Je n'ai pas la sensation de peur
que l'on peut éprouver parfois
aux heures les plus noires de la nuit...
Nous entamons la dernière ligne droite,
les prochains WC seront ceux de l'hopital !
et traversons une zone résidentielle,
de maisons bourgeoises d'une autre époque.
Aux fenêtres dont les volets sont restés ouverts,
les lumières encore allumées
nous discernons des intérieurs charmants
sous le charme des habits de Noël...
l'éclairage public nous accompagne,
la musique des roulettes de la valise sur le goudron aussi...
Voilà l'entrée de l'hopital qui se dessine devant nous
nous nous engageons vers le bâtiment,
la porte des urgence est ouverte,
mais pas d'agitation autour...
nous contournons le bâtiment,
itinéraire absolument pas prévus pour des piétons,
pour rejoindre l'entrée urgence obstétrique - maternité.
La porte est fermée, nous sonnons.
on nous indique de passer par les urgences,
cet accès étant temporairement condamné
merci Vigipirate !
Malgré l'affichage sur la porte.
Nous remontons vers les urgences,
et relongeons le bâtiment,
toujours pas prévus pour le passage de piétons
montée et tout-terrain sont difficiles...
Passés la porte des urgenes,
étonnement calmes
nous nous dirigeons vers le bureau,
Nostradamus se charge de tout,
moi j'ai filé au WC !
On nous envoie vers le service obstétrique
Nous parcourons les couloirs déserts,
arpentés un certains nombre de fois,
heureusement d'ailleurs, car il y a de quoi s'y perdre !
Puis nous sonnons à l'accueil du service,
dernière pause au WC pour moi...
Il est 2h30 du matin, on nous accueille,
on envisage examen puis monitoring,
avant de d'échanger le programme !
Le monito confirme les contractions,
l'examen le début du travail...
Dans la conversation,
notre mode de transport est évoqué...
le personnel est étonné,
pas courant d'avoir des "randonneurs"...
avec un discours qui hésite
entre inconscience et admiration,
D'un côté on s'inquiète du fait
que j'aurai pu accoucher sur le bord de la route,
de l'autre on me dit que mes contractions
auraient pu être un "faux travail",
et durer ainsi 24, 48, 72h...
et de savoir ce que nous aurions fait
si on ne nous avait pas gardé ?
Au final, on nous installe dans une chambre,
et moi, je continue ma marche...
d'abord dans le couloir,
puis vers le bureau des urgences pour faire l'admission
puis dans la chambre...
je m'arreterai qu'à 6h du matin,
fourbue, épuisée,
pour passer en salle d'accouhement,
et avoir la péridurale !
Ce qui est sur,
c'est que je ne regrette pas mon choix...
Cette nuit-là restera gravée dans ma mémoire,
une parenthèse hors du temps,
comme l'accouchement,
que j'ai du mal à ancrer dans la réalité,
même si Nostradamini est bien là pour nous le rappeler !
Et pour le retour,à la sortie de la maternité
Nostradamus a pris la familiale
pour charger les bagages
dont la moitié s'est avérée inutile,
car fournie par la maternité...
Et moi j'ai pris le bus avec Nostradamini...
Pour l'instant, Nostradamini
n'a pas encore mis un orteil
dans un métalausore...
ses seules sorties ayant été faites en écharpe !